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Photo du rédacteurKatell Magazine

Voisins De Paniers : « le drive paysan avant l’heure »



Le chiffre d’affaires de Voisins De Paniers a progressé de 30% en un an. Les clients revenus à une proximité dans leurs achats sont majoritairement restés abonnés au panier hebdomadaire de produits locaux. Un pas de plus pour l’association de Trédaniel née il y a 18 ans sur une idée : « aider les agriculteurs de notre territoire ».



Le principe est simple rappelle Annick Josset, l’une des pionnières et administratrice de l’association : « La meilleure façon de soutenir une agriculture citoyenne, familiale et respectueuse de l’environnement est de consommer ses produits ». Le premier confinement aura eu la vertu d’un retour aux sources de certains consommateurs dans l’obligation de faire leurs courses à proximité et de veiller à leur sécurité alimentaire. Une période de rush pour Voisins De Paniers (VDP) : 22% de paniers supplémentaires et une augmentation de 11 % du panier moyen. « La première semaine, nous avons été dépassés par les événements, raconte Odile, salariée de VDP depuis 2009. Quand on a vu le nombre de paniers s’envoler, il a fallu pousser les murs, organiser la logistique. Heureusement que notre chambre froide possède une grande capacité. Nous avons dû fermer les inscriptions pour pouvoir livrer les 206 paniers au lieu des 119 habituels. Si de notre côté nous devions adapter la logistique, les producteurs, eux, devaient aussi assurer leur capacité à fournir en quantité suffisante ».

une organisation différente. Dans les nouveaux consommateurs, nombreux sont ceux qui connaissent déjà les circuits courts comme Voisins De Paniers. « Ils y pensaient mais cela suppose une organisation différente de celle qu’ils ont. Jusque là ils ne franchissaient pas le pas », poursuit Odile qui a constaté une évolution du consommateur : « Au début, nos adhérents étaient engagés et prenaient part à la vie de l’association. Aujourd’hui ils sont sensibles à la démarche, au fait que ce soit des produits de qualité, à la rémunération des agriculteurs. Ils ont confiance mais la curiosité ne va pas forcément jusqu’à aller rencontrer les producteurs lorsque l’on organise des visites à la ferme ».

sans

pousser un caddie. Une trentaine d’agriculteurs travaille aujourd’hui avec l’association. Si, au début, les bénévoles les ont démarchés, aujourd’hui, ce sont eux qui frappent à la porte. Les premiers agriculteurs étaient déjà dans une démarche respectueuse de l’environnement. Aujourd’hui encore tout n’est pas bio, certains sont en agriculture durable et sont, au maximum, situés à 70 km du siège de l’association. Légumes, fruits et plants, produits laitiers, produits de la mer, viande, pain, oeufs, boissons, et incontournables galettes sont au catalogue dans lequel se trouve une offre large en épicerie et en produits d’hygiène. « Elle est élaborée pour satisfaire au maximum ceux qui ne souhaitent pas pousser un caddie dans un supermarché », repend Annick. Après avoir passé commande sur le site, les consommateurs récupèrent leurs paniers dans les 13 points de dépôts allant de Pordic à Lamballe

le producteur fixe son prix. Tous les produits sont locaux ou issus du commerce équitable, non OGM, de saison, en restant accessibles au plus grand nombre. Chaque producteur dispose d’une fiche consultable par les consommateurs. « Nous n’intervenons pas sur les prix : 87% reviennent directement aux producteurs et 13% compensent les frais de fonctionnement de l’association ». Parmi les membres du CA, un tiers sont des producteurs. « Ils nous apportent leurs connaissances techniques pour que nous prenions des décisions réalistes pour eux. Nous avons aidé nombre d’entre eux à passer en bio ». Travailler avec VDP, c’est aussi de meilleures conditions de travail pour les producteurs : « Pour faire le volume qui leur est commandé chez nous, certains devaient faire plusieurs marchés par semaine. Cela leur permet de produire ce qui est nécessaire, de limiter les pertes et donc d’améliorer leur rentabilité ».

un modèle gonflé. Le chiffre d’affaires record du dernier exercice, près de 500 000€, assure une visibilité et un certain confort. « C’est surtout autant d’argent qui bénéficie à notre économie locale », ajoute le président Gilles Salmon. Unanimes, ils se souviennent que tout « n’a pas toujours roulé comme sur des roulettes », comme l’expérimentation non concluante en restauration collective. « Nous avons aussi inventé notre modèle tant en terme comptable qu’en terme de gestion des commandes sur le site internet ou encore notre process logistique », précise Annick. Aucune volonté de grossir indéfiniment, Voisins De Paniers est plutôt dans une démarche d’essaimage. «Nous sommes souvent sollicités pour présenter notre modèle. Notre envie est plutôt d’inspirer de nouvelles initiatives comme la nôtre, d’aider d’autres consommateurs à prendre en main leur façon de consommer, de leur faire gagner du temps». Pionnière en la matière, Voisins De Paniers n’est pas une AMAP, association pour le maintien d’une agriculture paysanne, mais bien une association de consommateurs. « Finalement, nous avons créé le drive paysan avant l’heure, suite à un forum social en 2004 et sur l’impulsion d’une poignée de consommateurs de la région de Moncontour. A l’époque, les circuits courts étaient peu connus et aucun d’entre nous n’avait de lien avec l’agriculture. C’était un peu gonflé de créer notre style de commerce et d’aider les agriculteurs. Nous étions conscients que c’était innovant».

voisinsdepaniers.org



"Proposer une nouvelle coordination marchande,

c’est innover"


Patrice Hénaff, directeur de Rich’ESS,

pôle d'Economie Sociale et Solidaire du Pays de Saint-Brieuc


«En créant Voisins De Paniers, les consommateurs ont ouvert le champ des possibles tant pour eux que pour les producteurs. Ils proposent une nouvelle coordination marchande, refo

rmulent des dynamiques locales et font émerger de nouvelles pratiques socio-économiques. L’alternative au système marchand qu’ils proposent vise à mieux répondre aux besoins et au bien-être de la popoulation de leur territoire mais aussi à repenser le mécanisme de formation des prix. Dans ce circuit court, s’associent proximité, liens interpersonnels, transparence et confiance. Consommateurs et producteurs font le choix de ce qu’il est possible de réaliser et de ce qu’il est souhaitable de valoriser dans une démarche de développement durable. En inventant une nouvelle coordination des relations entre les acteurs locaux afin de répondre à des attentes sociales, ils innovent !»



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